Recrutement difficile en viticulture

Catégorie(s) : Actualités

Ajouté le : 09 Juil, 2018

Les acteurs de la profession ont longuement discuté lors des portes ouvertes. A gauche de profil, le directeur de Pôle Emploi. En face de lui, le sous-préfet.
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Soucieux de ce phénomène, des acteurs de la profession se sont réunis à l’occasion de portes ouvertes au domaine des Millarges.

C’est simple : j’ai arrêté de me développer. Ces mots sont ceux de Jérôme Billard, du domaine de La Noblaie. Depuis quinze ans qu’il est installé, le viticulteur a toutes les peines du monde à recruter ces dix dernières années. Exemple. En février, lui et Pôle Emploi organisent conjointement un job-dating. Alors que la saison d’ébourgeonnage approche, le viticulteur a besoin de personnel pour un mois et demi. Bilan : il recrute huit personnes, quatre se présentent le premier jour, trois restent moins de quatre jours, la dernière pousse jusqu’à une semaine, pas plus. « Je ne demandais pas de diplôme en plus, peste-t-il. Je suis déçu. Je pensais même en contractualiser un ou deux après en CDD ou CDI. »
Jérôme Billard n’est pas le seul viticulteur à constater cette conjoncture. Sa branche représente 3.500 emplois dans le Chinonais selon Pôle Emploi, tous contrats confondus : apprentissage, alternance, CDD, CDI.
3.500, c’est aussi le nombre de demandeurs d’emploi dans la même zone. « Environ 300 d’entre eux disent vouloir travailler dans les vignes, détaille Stéphane Ducrocq, directeur de Pôle Emploi Chinon, mais beaucoup ne font que les saisons et ne veulent pas se former. On peut travailler toute l’année dans la viticulture. Il y a le travail manuel, la transformation, la vente, etc. »
Le CFA ouvre une nouvelle formation Ainsi, l’agence, le syndicat des vins et la préfecture de Chinon, l’interprofession des vins du Val de Loire, le CFA agricole et les viticulteurs ont donné récemment rendez-vous aux demandeurs d’emploi et autres intéressés par les métiers de la vigne au domaine des Millarges, à l’occasion de portes ouvertes. Au programme : présentation des travaux qui entourent la vigne, échanges, partages d’expériences, témoignages de situations. « On a toujours un ou deux postes vacants au moins, explique Jérôme Billard. La vigne n’attend pas. Pour l’ébourgeonnage par exemple, si on le retarde, on multiplie le temps passé à s’en occuper. Ça peut passer de 30 heures à 90 heures par semaine. Et ce retard, on le traîne toute la saison. »
Les besoins sont réels et l’Agence pour l’emploi n’est pas seule à déployer les moyens. Au CFA de Chinon, le directeur, Xavier Binet, a ouvert deux formations viticoles. Une il y a dix ans, spécialisée dans la taille de vignes, une autre vieille de trois ans maintenant, spécifique aux premiers gestes viticoles. Il situe : « A chaque fois, cela vient d’une demande des viticulteurs. Nous répondons à un besoin. » Besoins qui sont tels qu’une troisième formation démarre à la rentrée : un contrat de qualification professionnelle (CQP) tractoriste conduite d’engins agricoles. « La formation taille de vignes, c’est 90 % d’embauches à la sortie, chiffre-t-il. La formation premiers gestes est souvent complétée par une spécialisation supplémentaire. Si ces deux formations existent encore et qu’on en lance une nouvelle, c’est qu’il y a une vraie demande des professionnels. Aujourd’hui, j’ai davantage de maîtres d’apprentissage que de gens qui veulent se former. » Des explications, professionnels du vin et Pôle Emploi ont du mal à en donner. La question de personnes ne travaillant que pour les saisons afin de toucher ensuite le chômage a pu se poser, mais Stéphane Ducrocq la balaie : « Un chômeur sur deux est indemnisé par Pôle Emploi. Ce n’est donc pas une question d’assistanat, c’est plus profond que cela. »